Enjeux scientifiques

Les sites paléolithiques sont des mondes vivants où interagissent les communautés humaines et les populations animales. Le milieu karstique apparaît comme une place attractive pour l’ensemble de ces groupes, principalement en raison de ses qualités d’abri. Les prédateurs occupent une place particulière au sein de ce milieu, qu’ils le fréquentent occasionnellement ou qu’ils l’occupent durablement. Cependant, ces grottes ne sont que rarement utilisées par une espèce unique (humain ou animal). Les accumulations osseuses mises au jour sont ainsi le résultat d’interactions entre les différents population animales, mais également avec les communautés humaines du Paléolithique.

Les communautés de prédateurs humains et non-humains du Paléolithique partagent un fond écologique commun alliant recherche, acquisition et exploitation des ressources alimentaires (prédation) et occupation de lieux de vie communs, abris ou grottes. Il existe ainsi de nombreux gisements au sein desquels des traces d’activités humaines et animales peuvent être reconnues. Par conséquent, l’étude de ces gisement ne se résume pas seulement à identifier un niveau d’occupation humaine et de décrire les modalités de gestion et d’exploitation des ressources animales, mais nécessite en premier lieu de discriminer le rôle de chaque agent taphonomique (humain ou non-humain) affectant la mise en place du dépôt osseux.

De plus, les carnivores affectent l’évolution des comportements de prédation des groupes humains. Carnivores et humains partagent en effet des niches écologiques proches. Ils coévoluent et coexistent dans les mêmes environnements, si bien qu’ils entrent régulièrement en compétition. Des modifications des stratégies de subsistance des prédateurs (aussi bien humains que non-humains) sont ainsi induites par des processus de pression de compétition. Cependant ces éléments écologiques et le rôle du carnivore sur l’évolution des comportements humains restent trop peu considérés.

Le site archéologique et paléontologique dit Les Auzières (Méthamis, Vaucluse) s’inscrit dans le cadre de ces problématiques d’interactions entre Hominidés et Carnivores. L’exploitation des données issues de la fouille fait de ce site à occupation mixte un élément clef pour la compréhension du rôle des Carnivores dans le milieu karstique.

Rare site daté du Paléolithique moyen du secteur des gorges de la Nesque, il y constitue l’unique occurrence néandertalienne (à l’exception du Bau de l’Aubesier, dont l’occupation est plus ancienne). Le site présente une importante séquence stratigraphique (plus de 4 mètres de remplissage) qui reflète des modalités d’occupations diversifiées : depuis les occupations humaines néandertaliennes de courtes durées au cours du Stade Isotopique 5 (environ 100000 ans avant le présent) jusqu’aux tanières d’hyènes du Stade Isotopique 4 (environ 60000 ans avant le présent).